Quelle différence existe-il entre l’or et les compagnies qui le minent ? Quel est le profil des compagnies minières ? Quels sont les différents risques et les performances associées aux minières en comparaison au cours de l’or ? Voilà autant de questions indispensables à la compréhension du marché de l’or. En effet, la plupart des compagnies minières affichent des rendements relativement élevés. Ainsi, le coût de production de l’or est un paramètre essentiel, à la fois au cours de l’or, mais également à la rentabilité immédiate des compagnies minières d’or. À ce jour, la plupart des compagnies minières cotées et accessibles aux investisseurs sont situées en Amérique du Nord. Comme nous le montrerons, la rentabilité de ces sociétés peut varier significativement en dépit du fait que leur endettement est extraordinairement faible. Décryptage du comportement des compagnies minières, qui offrent souvent plus de 3% de rendement, et des mécanismes qui les relient au cours de l’or.

Les principales compagnies minières

Parmi les plus grandes compagnies minières de la planète, on peut lister Newmont, Barrick Gold, Franco Nevada, Agnico Eagle Mines, Wheaton ou encore Polymetal, mais aussi Royal Gold ou Gold Fields… Au sein des 40 plus grandes capitalisations des compagnies minières, la plus grande partie est canadienne. Nous devons cependant prendre en compte la moins bonne accessibilité des compagnies russes et chinoises aux investisseurs particuliers occidentaux.

Dans le tableau ci-dessous, nous avons représenté le détail des données pour huit compagnies minières. Ces huit sociétés figurent parmi les plus grandes minières mondiales (le classement est réalisé selon la plus grande production annuelle d’or ou production en équivalent or). En moyenne, les principales compagnies minières mondiales fournissent un rendement de plus de 3%, ce qui est assez honorable en période de repli des marchés. Par ailleurs, une compagnie minière est cotée en moyenne 4 à 5 milliards $ à partir de l’étude d’une quarantaine de compagnies. Il semble cependant qu’il existe un lien plus ou moins important entre la rentabilité de ces compagnies et les quantités d’or minées.

 

Principales compagnies minières aurifères

Position (production) Compagnie Production annuelle (chiffres 2021, en tonnes d'or et GE équivalent or) Pays (par siège social) Rentabilité (dividende/action, 2021)
 1  Newmont Mining 168  États-Unis 4%
 2 Barrick Gold 125 Canada  4,9%
 3  Polyus Gold 77 Russie 5,3% (en roubles)
 4 Gold Fields 66,5 Afrique du Sud 2,9%
 5 Agnico Eagle Mines 60 Canada 3,3%
6 Polymetal International 48 Jersey/Russie 0,45%
7 Wheaton Precious Metals 21,5 Canada 1,73%
8 Royal Gold 2,5 États-Unis 1,36%
Total --- 547 --- Moyenne = 3,42%

 

De plus, les 8 plus grandes compagnies minières que nous avons listé produisent à elles seules l’équivalent de 15,2% de toute la production minière mondiale d’or. Avec une production cumulée de quasiment 550 tonnes, la part de ces quelques compagnies dans la production mondiale (3 580 tonnes) n’est pas négligeable. En outre, nous devons rappeler que la Chine et la Russie mènent la production d’or et que de nombreuses compagnies sont moins accessibles aux investisseurs particuliers occidentaux. En ce qui concerne la compagnie Russe Polymetal, 44% du chiffre d’affaires est réalisé en Russie, et le tiers au Kazakhstan. Ainsi, 86% du chiffre d’affaires est réalisé sur l’or, et le reste sur l’argent. Chaque société à donc des spécificités géographiques et les coûts d’extraction d’une once d’or sont très différents d’une compagnie à l’autre. Par exemple, la société sud-africaine Gold Fields a produit plus de l’or pour un coût moyen de presque 1 300$ par once. A l’inverse, Newmont Mining produirait de l’or pour un coût moyen plus faible de 970 $ par once. La différence en matière de coûts expliquerait ainsi la présence d’un écart mathématique dans les rentabilités des différentes sociétés (par un facteur de 1,34).

Le rouage de l’industrie minière : le coût de production

Nous le comprenons donc, toute l’industrie minière dépend du coût de production de l’or. Nous ne reviendrons pas en détail sur l’importance du coût de production de l’or par rapport au cours mondial de l’or. Pourtant, la majeure partie de l’évolution à très long terme du cours de l’or est le fait de l’évolution des coûts de production. Ce pouvoir de marché des compagnies minières est dû à la concentration de l’offre (80% de toute l’offre d’or provient de mines d’or).

Nous avons donc ici à faire à un paradoxe :

  • La hausse du prix de l’or est un facteur haussier pour la rentabilité des compagnies minières.
  • Cependant, on sait aussi (à long terme) que l’or est en partie déterminé par son coût de production.
  • Il en résulte qu’une hausse de l’or induite par la hausse semblable des coûts de production n’aura aucun effet sur la rentabilité des compagnies minières. A l’inverse, une hausse du cours de l’or sans hausse des coûts sera généralement favorable aux compagnies minières. En ce sens, seul l’exploitation de mines (ou nouvelles mines) avec un faible coût de production de l’or permet une hausse durable de la rentabilité des compagnies minières.

Le coût de production est donc un des déterminants majeurs de la capacité de certaines compagnies à augmenter leur part de marché, à bénéficier de perspectives de long terme, ou à disposer d’une situation financière favorable (faible endettement…). Les paramètres qui influent sur le coût de production de l’or sont multiples, mais bien réels : matériel à disposition, abondance de l’or, facilité de minage selon les zones, coût de la main d’œuvre, risques de change, coûts de transport…

De plus, l’endettement des compagnies minières est généralement très faible, ce qui permet de disposer d’une sécurité financière supplémentaire. Le ratio dette/actions pour Barrick Gold s’élève ainsi à 0,16 en 2022, et 0,28 pour Newmont Mining, contre près de 1,6 pour les sociétés du S&P 500 en moyenne. En général, le ratio de dette est corrélé plus ou moins de manière inverse au cours de l’or. La chute du cours de l’or aura tendance à mettre sous tension les compagnies, ce qui implique mécaniquement une hausse de l’endettement. Enfin, dans une note récente, BNP Paribas soulignait qu’un prix de l’or au-dessus de 1780 $ l’once se traduisait par une augmentation des flux d’or de la part des compagnies minières. En ce sens, on en déduit que le seuil charnière de coût se situe aux environs de 1 700 $ actuellement. Une chute durable du cours de l’or sous 1 700 $ pourrait éventuellement réduire l’offre sur le marché et provoquer une continuité dans l’avenir du cycle haussier. Ce seuil est d’autant plus important qu’il semble agir comme un équilibre de marché de moyen terme et de long terme.

Quelles performances ?

Dans le cas de Newmont Mining, qui rappelons-le est une des compagnies minières avec les plus fortes performances, le cours enregistre une hausse mensuelle moyenne de +0,92% entre 2000 et 2022. En comparaison, l’or performance en moyenne de près de +1% par mois. Il y a donc une performance similaire entre l’or et Newmont Mining. Néanmoins, la différence entre l’or et les compagnies minières (Newmont Mining dans notre cas) tient à la différence significative de volatilité.

La volatilité annualisée mesurée sur Newmont Mining dépasse 30% sur la période 2000-2022. En comparaison, la volatilité de l’or évolue généralement entre 15% et 20%. C’est-à-dire que les compagnies minières peuvent être jusqu’à deux fois plus volatiles que le cours de l’or lui-même. En d’autres termes, le risque d’investissement présent sur les compagnies minières est supérieur au risque d’investissement sur l’or à performances égales. Néanmoins, les compagnies minières présentent un avantage non-négligeable : elles permettent d’augmenter les performances de son portefeuille sur du moyen terme. Le fait que le cours des minières soit sujet à de grandes variations, le plus souvent symétriques au cours de l’or, explique aussi la surperformance ou la sous-performance quasi-systématique des minières face à l’or

Enfin, nous omettons ici une considération. Les compagnies minières fournissent des rendements non négligeables. En outre, le faible endettement des compagnies minières augmente par ailleurs leur rentabilité.

Enfin, plusieurs indices existent (comme le HUI), regroupant l’évolution de cours de plusieurs compagnies minières. C’est par exemple le cas du Dow Jones Gold Mining Index. Ce type d’indices nous offrent une représentation de l’évolution du cours des principales compagnies minières. Sur le premier trimestre 2022, l’indice Dow Jones pour les compagnies minières a ainsi performé de plus de 40%... Mais la chute sur le second semestre n’en fut que plus brutale. Cet indice met en avant l’extrême volatilité de cours des minières. Entre 2011 et 2016, l’indice a chuté de plus de 77% avant de rebondir de plus de 400% pour reprendre et dépasser ses niveaux de 2011. Ainsi, le précédent record de l’indice était de 140 en 2011, pour finalement s’établir à 40 en 2016, comme suggéré par l’objectif technique (figure en épaule-tête-épaule en 2012).

 

 

Actuellement, l’indice se situe dans un canal ascendant dessiné depuis 2016. La sortie de ce canal projetterait une chute plus importante vers les niveaux de 2019. Pour autant, on remarque que l’indice connaît des évolutions assez symétriques au cours de l’or, avec généralement une exagération des mouvements de prix. Ainsi, la baisse des compagnies minières est souvent exagérée à la chute du cours de l’or en raison de la chute plus rapide de la rentabilité des compagnies. À l’inverse, la hausse du cours de l’or augmente très rapidement la rentabilité des sociétés minières lorsque le cours de l’or excède rapidement le coût de production. Souvent encore, les récessions sont des moments plus ou moins profitables pour les compagnies minières du fait de la hausse de la demande conjoncturelle.

En conclusion

En conclusion, nous avons montré que les principales compagnies minières ont un fort pouvoir de marché, et produisent une part significative de la production mondiale d’or. La rentabilité des principales minières excède souvent 3% et leur faible endettement depuis plusieurs années est un critère supplémentaire à leur viabilité. Chaque année, ces principales compagnies minières contribuent à l’arrivée sur le marché de l’or de nombreuses centaines tonnes d’or. Il est aussi important de souligner le pouvoir de l’offre sur le marché de l’or.

Pour autant, nous devons souligner le rôle du coût de production de l’or. D’une part, celui-ci détermine en grande partie l’évolution à long terme du cours de l’or. D’autre part, des coûts de production plus élevés réduisent la rentabilité des compagnies minières. Les minières restent toujours confrontées à une hausse structurelle des coûts, qui doit idéalement s’accompagner par une hausse du cours de l’or. Cette sensibilité au coût de production explique aussi la différence de comportement entre l’or et les compagnies minières. Les compagnies minières sont jusqu’à deux fois plus volatiles que le cours de l’or, mais possèdent des performances pourtant légèrement inférieures au cours de l’or. En ce sens, les compagnies minières offrent des performances généralement similaires (hors dividendes) pour un risque globalement plus grand.

Dès lors, l’investissement dans les minières suppose la recherche du rendement sur des périodes longues, ou bien la recherche de plus-values sur du moyen-terme (quelques mois). Dans ce cas, les actions de compagnies minières peuvent s’avérer profitables et extrêmement lucratives sur des périodes spécifiques. À ce jour, une chute durable du cours de l’or sous 1 700 $ l’once tendrait à maintenir des tensions sur de nombreuses compagnies minières.

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