L'Italie a présenté un budget qui ne respecte pas les demandes de Bruxelles. Un bras de fer s'engage entre le gouvernement italien eurosceptique et la Commission européenne. Olivier Delamarche nous explique pourquoi un défaut de l'Italie sur ses dettes fera sauter les banques.

 

 

Olivier Delamarche : Imaginez que les taux montent de un point, deux points... Ça mettrait l'Italie à terre. Là, vous risquez d'avoir des banques qui sautent... Et l'échéance pour la présentation du budget italien est à la fin du mois. Imaginons que les Italiens présentent un budget qui ne plaise pas à, vous savez, celui qui a une "sciatique"...

Richard Détente : M.Juncker.

OD : Il est touché là où ça fait mal. M. Juncker commence à traiter les Italiens de tous les noms d'oiseaux qu'il connaît. Il y a des petits échanges...

Il va probablement y avoir une augmentation, parce que les gens vont avoir peur, du 10 ans italien. Puis, d'ailleurs, de toute la courbe des taux italienne.

Qu'est-ce qu'il risque de se passer ? Il y a quelques années en arrière, et je ne parle pas de l'Italie, vous aviez des États endettés à 50% du PIB...

RD : Un taux raisonnable...

OD : C'était le taux de beaucoup de pays à cette époque-là, avant 2008. Donc, si vous avez un taux d'endettement aussi faible, et que vous montez les taux d'un point, ça vous fait 0,5 en plus à payer par rapport à votre PIB.

Si vous êtes comme les Japonais, qui ont 250 % de dettes par rapport à leur PIB...

RD : On multiplie par 2,5...

OD : Vous multipliez par 2,5. Prenez un point, il faut 2,5% de croissance pour les payer...

Le calcul est simple. Des pays ont largement dépassé les 100%... L'Italie est autour de 135%. Quand vous êtes à 4% sur les taux italiens : 135 % de 4, si mes calculs sont exacts, ça fait quoi ? Ça fait 5 et quelques.

Vous croyez que vous allez avoir 5,40% de croissance en Italie ? Non. "Never".

Ça veut dire que vous allez continuer à vous endetter pour essayer de rendre ces taux soutenables.

Donc là, les banques italiennes ont des centaines de milliards d'obligations pourries. Vous avez 360 milliards d'obligations pourries en Italie. Sur les 360 milliards, vous en avez 200-250 qui ne sont pas pourris, mais irrécouvrables. Vous pouvez les mettre à zéro.

Par rapport à un PIB de 1 600 milliards... Faut faire le calcul, mais ça représente quand même un paquet du PIB.

Donc, imaginez que les taux montent d'un point, de deux points... Ça mettrait l'Italie à terre. Là, vous risquez d'avoir des banques qui sautent.

L'échéance pour la présentation du budget italien est à la fin du mois... Ça peut partir à la dérive à ce moment-là.

RD : D'autant que Trump a proposé un coup de main pour acheter leur dette.

OD : Il faut bien se rendre compte que ce système est pourri. C'est un château de cartes. Au moindre pépin, nous allons malheureusement en subir les conséquences.

Les banques centrales sont gentilles, mais quand elles font croire que l'argent facile est terminé, que les taux à zéro c'est fini, et que les quantitative easing sont terminés... Ce n'est pas vrai.

RD : On va très vite y retourner...

OD : Elles peuvent faire de la com' et faire semblant, mais elles savent qu'au moindre petit accroc, elles vont y retourner "no limit".

RD : Toute la phase de QE, d'impression, d'assouplissement et autres termes jargonneux... on va y retourner assez rapidement, parce que les conditions ne s'y prêtent pas.

OD : Vous ne pouvez pas laisser monter les taux. C'est tout.

RD : Il y a un truc très important à comprendre : C'est le rapport entre dette et rendement. (Voir la vidéo : Les banques centrales ont fait disparaître la croissance).

Quand les rendements s'effondrent, la machine "schumpéterienne" se casse. C'est-à-dire que, lorsque vous êtes une entreprise boiteuse et que vous avez de l'argent pas cher, vous pouvez vivre. Quand vous avez de l'argent à 5%, vous ne pouvez plus vivre.

OD : Il est rigolo de voir ces dizaines d'économistes se masturber le cerveau en se disant : "Je ne comprends pas pourquoi il n'y a pas d'inflation ?".

Les QE sont déflationnistes alors, évidemment, il n'y a pas d'inflation !

Comme vous le dites, quand vous avez des taux qui sont maintenus artificiellement à zéro par les QE, par les achats des banques centrales... ça permet à des entreprises qui normalement, auraient dû mourir, de ne pas mourir. Donc, vous avez des surcapacités qui se créent. Comme vous avez des surcapacités qui se créent, en plus, ces entreprises boiteuses font de la concurrence deloyale sur les prix, puisqu'elles font des produits pourris. Elles font de la concurrence sur les prix, donc les prix baissent et c'est purement déflationniste.

Ces guignols se demandent en permanence pourquoi, avec les QE, il n'y a pas d'inflation... Tout simplement parce que c'est déflationniste. Donc il ne peut pas y avoir d'inflation.

Puis, imaginer que les QE donnent de l'activité, c'est aussi complètement idiot. En quoi racheter des obligations sur le marché et les mettre en stock dans votre banque va amener de l'activité ?

J'ai assisté à des discussions où ils avaient l'air super sérieux en plus ! À se demander : "Mais tu comprends, toi, pourquoi y a pas d'inflation ?"...

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