La Grèce vient de déclarer qu’elle ne rembourserait pas le FMI en juin. Une tranche de 1,6 milliard d’euros arrive à échéance, mais "il n'y a pas d'argent" pour faire face à cette obligation annonce le ministre de l’intérieur. Selon le ministre de l’économie, Yanis Varoufakis, jusqu'ici "nous nous sommes remarquablement débrouillés pour honorer nos dettes, mais à un certain moment, ce ne sera plus possible." Le chef du gouvernement, Alexis Tsipras, l’a confirmé : "Nous avons fait ce que nous avions à faire, c'est maintenant au tour de l'Europe".

Le feuilleton grec dure depuis longtemps, le printemps 2010 précisément, mais jamais le défaut pur et simple n’a-t-il semblé aussi proche, ni clairement et calmement assumé par les autorités du pays. Ces 1,6 milliards d’euros ne représentent qu’une petite partie des 240 milliards d’euros qui sont dus à l’Union Européenne, à la BCE et au FMI : la Grèce a été polie, elle n’a pas annoncé un défaut sur l’intégralité de sa dette, seulement sur une tranche, pour voir ce qui va se passer. Mais chacun sait que le pays est incapable de rembourser ces 240 milliards d’euros.

Nous pouvons nous rassurer en considérant la Grèce comme le vilain petit canard parmi les pays "développés", le cancre, celui qui fait régulièrement faillite, certes. Mais prenons un peu de recul : l’Espagne peut-elle rembourser sa dette ? Et l’Italie ? La France ? Le Japon ? Les Etats-Unis ? Non, bien sûr. Selon le cabinet McKinsey, la dette globale (publique et privée) représente 286% du PIB mondial, et elle augmente fortement depuis la crise de 2008. C’est déjà trop tard. La Grèce est juste un peu en avance sur nous.

Pour l’instant la situation demeure gérable par la plupart des pays parce que les taux sont à zéro. La croissance est faible ou nulle, mais les Etats empruntent à des taux très faibles, parfois même négatifs, la corde autour de leur cou ne se resserre donc pas. Mais ces taux au plancher ne peuvent pas éternellement durer, la situation que nous vivons s’avère tout à fait exceptionnelle historiquement parlant. Que les taux remontent et la "grécification" menacera la plupart des pays européens, le Japon et les Etats-Unis.

On peut parier que l’Union Européenne trouvera une solution pour éviter un défaut de la Grèce sur ses engagements envers le FMI au mois de juin. Un tel aveu d’échec provoquerait d’importantes tensions sur les marchés (et une remontée des taux !), et une possible sortie du pays de la zone euro, ce qui constituerait un vrai cataclysme. Depuis 2010 on colle des rustines sur la dette grecque, il n’y a pas de raison d’arrêter. La fiction d’une Grèce capable de faire face à ses engagements va continuer à être défendue à tout prix par les autorités bruxelloises, contre toute logique.

Mais de nombreux autres pays ne sont pas vraiment éloignés de la situation grecque, et une remontée des taux les mettrait immédiatement en difficulté. Le problème d’une dette insoutenable ne sera bientôt plus l’apanage de la seule Grèce mais deviendra notre horizon à nous tous.

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